Étiquette La France divisée contre elle-même
Cetitre un peu compliqué est tiré de l'Evangile de Matthieu: "Tout royaume divisé contre lui-même sera réduit en désert" ou "court à sa ruine" et, "toute ville ou toute maison divisée contre elle-même s'écroulera."Jésus venait alors de guérir un possédé, aveugle et muet. Les pharisiens qui l'apprirent ne s'en tinrent pas là et dirent que Jésus était Béelzébuth, s'il pouvait Par et Patrick Roger avec Richard Werly, Frédéric Dabi Émission du lundi 13 juin 2022 La vérité en face du lundi au vendredi à 9h30 ! Avec Richard Werly, correspondant du journal suisse Le Temps » en France, auteur de La France contre elle-même. De la démarcation de 1940 aux fractures d’aujourd’hui » aux Éditions Grasset et Frédéric Dabi. Les invités Richard Werly Correspondant du journal suisse Le Temps » en France, auteur de La France contre elle-même. De la démarcation de 1940 aux fractures d’aujourd’hui » aux Éditions Grasset Frédéric Dabi Elleest composée d’acteurs largement favorables à l’application de mesures sanitaires strictes et très mobilisés contre la désinformation en ligne et la complosphère dans ce contexte spécifique. Cet investissement les amène parfois à amplifier de manière involontaire et contre-productive certaines sources de désinformation en voulant les dénoncer.Il y a tout pile un an, l’Atlas du Français de nos Régions éditions Armand Colin était disponible dans toutes les bonnes librairies. Pour fêter cet anniversaire, j’ai eu envie de rédiger un billet que les internautes réclamaient depuis longtemps, qui porte sur les dénominations du récipient, en verre, en métal ou en terre cuite, que l’on utilise pour servir de l’eau à table. Dans l’une des précédentes éditions du sondage Quel français régional parlez-vous? » la 7e de la série principale, j’avais introduit la question suivante En famille ou à la cantine de l’école, comment appelez-vous le récipient ayant pour fonction de servir de l’eau? » Quel français régional parlez-vous? C’est le nom d’une série de sondages linguistiques, auxquels nous invitons les lecteurs de ce blog à participer. Les cartes qui y sont présentées sont en effet réalisées à partir de sondages. Plus les internautes sont nombreux à participer, plus les résultats sont fiables. Pour nous aider, c’est très simple il suffit d’être connecté à Internet, et de parler français. Pour le reste, c’est gratuit et anonyme. Vous avez grandi en France, en Suisse ou en Belgique, cliquez ici; si vous êtes originaire du Canada francophone, c’est par là . La question était accompagnée de l’image d’un pot en verre, et suivie de la liste de choix de réponses ci-après un broc un broc d’eau [prononcé brodo] un broc d’eau [prononcé broKdo] un broc à eau une carafe une cruche un pichet un pot d’eau autre précisez Sur la base des codes postaux des localités dans lesquelles les participants au sondage plus de ont indiqué avoir passé la plus grande partie de leur jeunesse, nous avons comptabilisé, pour chaque arrondissement de France et de Belgique, de même que pour chaque district de Suisse romande, le pourcentage de chacune des réponses possibles. Nous avons ensuite utilisé des méthodes d’interpolation spatiale pour obtenir une surface lisse et continue du territoire. Lire aussi >> Variations sur les dénominations du kebab Quelques définitions Les résultats nous ont pour ainsi dire surpris on ne s’attendait pas à observer des aires d’emploi si compactes et si bien délimitées, compte tenu du fait que les mots proposés appartiennent tous au français commun ». Dans le TLFi, aucune des variantes en présence n’est marquée comme régionale ». Les linguistes appellent régionalismes de fréquence ces expressions qui appartiennent au français commun que tout le monde connaît, et que tous les dictionnaires mentionnent sans marque diatopique, mais dont la fréquence d’emploi est plus élevée dans certaines régions. Les définitions qu’on en trouve sont, cela dit, toutes assez proches un pichet est un récipient de petite taille, de terre ou de métal, de forme galbée avec un collet étroit où s’attache une anse, utilisé pour servir une boisson »; à l’entrée broc, la définition change à peine récipient à anse, de taille variable, le plus souvent en métal, avec un bec évasé, utilisé pour la boisson ou pour transporter des liquides ». La définition de cruche n’est guère différente non plus vase à large panse, à anse et à bec, destiné à contenir des liquides ». Si le récipient a un col étroit et ne possède pas d’anse, on l’appelle carafe bouteille en verre ou en cristal à base large et col étroit que l’on remplit d’eau, de vin ou de liqueurs ». Enfin, le mot pot est le plus sous-spécifié de tous les termes en présence récipient à usage domestique, de forme, de matière et de capacité variables, servant à contenir diverses substances, très souvent des liquides et des ingrédients plus ou moins solides ». pichet Dans notre sondage, les internautes utilisant le mot pichet sont clairement majoritaires cette réponse a été cochée plus de fois. Sur le plan géographique, ils s’agit de participants surtout originaires de la moitié ouest de la France, bien que le mot soit également employé dans le Nord-Pas-de-Calais. Fig. 1 Vitalité et aire d’extension du mot pichet d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. La répartition que l’on observe sur notre carte est cohérente avec l’étymologie du mot, que l’on trouve utilisé originellement dans les dialectes de Normandie, du Centre et de l’Ouest de la France FEW. À l’opposé, on observe sur un petit quart nord-est, qui englobe la Belgique, de même que dans le département de la Seine-Maritime, une majorité de participants ayant indiqué employer le mot cruche pour désigner ce récipient. Fig. 2 Vitalité et aire d’extension du mot cruche d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. L’étymologie germanique du mot cruche, déjà attesté en ancien français TLFi, ne nous aide pas vraiment à comprendre les raisons d’être d’une telle aire. broc, broc d’eau, broc à eau Sur cette troisième carte, nous avons regroupé les variantes impliquant le mot broc, à savoir broc, broc à eau et broc d’eau prononcé [brodo]. Fig. 3 Vitalité et aire d’extension des variantes broc, broc à eau et broc d’eau prononcé [brodo] d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. On peut voir que l’aire de broc est coincée, dans la partie septentrionale de la France, entre l’aire de pichet et celle de cruche. Elle forme comme une espèce de tache d’huile autour de l’Île-de-France, remontant jusqu’à la Somme et redescendant jusqu’au Puy-de-Dôme en passant par le Cher. Pour filer la métaphore, on pourrait même dire qu’une goutte s’est échappée de cette tache dans le Var. pot d’eau vs pot à eau Les deux cartes ci-dessous permettent de rendre compte de la vitalité et de l’aire d’extension des variantes pot et pot d’eau à gauche, et pot à eau prononcé [potâo] à droite. La forme pot à eau ne figurait pas dans les choix de réponses, mais elle a été suggérée tellement de fois dans la case autre précisez » qu’il nous a été permis d’en donner une représentation sous forme de carte Fig. 4 Vitalité et aire d’extension des variantes pot et pot-d’eau à gauche, et du tour pot-à -eau prononcé [potâo] à droite, d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. On peut voir que les variantes pot et pot d’eau sont surtout employées dans une région dont le cœur est Lyon, et dont les frontières recoupent, à quelques kilomètres près, l’aire dialectale du francoprovençal ce qui ne veut pas dire pour autant que le mot vienne de cette famille de parlers. Lire aussi >> Survivances des parlers francoprovençaux en français, épisode 1 les animaux Quant à la forme pot à eau, c’est dans une région moins large, autour des villes de Privas en Ardèche et Valence dans la Drôme, que l’on a le plus de chances de l’entendre. carafe Enfin, notre sixième carte rend compte de la vitalité de la forme carafe. On peut voir que le mot est connu partout les zones vertes sont les zones où les pourcentages sont les plus faibles, mais ils ne sont jamais nuls. Fig. 5 Vitalité et aire d’extension du mot carafe d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. Si l’on y regarde de plus près, on devine aisément que c’est dans le sud de la Gascogne et dans les la partie la plus occidentale du Languedoc que le mot carafe cumule des pourcentages approchant les 100%, ce qui suggère que dans cette région, contrairement au reste du territoire, on n’utilise guère d’autres mots pour désigner le récipient de table qu’on utilise pour servir de l’eau. Si on devait conclure En guise de synthèse, nous avons réalisé la carte suivante Fig. 6 Les principales dénominations du récipient destiné à contenir de l’eau à table d’après les enquêtes Français de nos Régions 7e édition en français. Les traits épais délimitent les frontières entre la France et la Belgique d’une part, entre la France et la Suisse d’autre part. Cette dernière carte doit être interprétée avec prudence, et à la lumière de ce qui précède on a vu que, presque partout, d’autres variantes étaient utilisées. De fait, la carte rend simplement compte des régions où l’on a observé les pourcentages les plus élevés pour chaque item proposé dans le questionnaire. Les données dialectales de l’ALF récoltées par E. Edmont et éditées par J. Gilliéron ne permettent pas de documenter la situation dans les dialectes galloromans parlés vers la fin du XIXe s. Le questionnaire comprenait les mots pot » carte 1065 et cruche » carte 1526. Le sens exact du mot pot » n’a pas été précisé dans l’enquête dialectale ; quant au mot cruche », il est fortement polysémique, comme le révèlent les réponses des témoins qui donnent des noms différents à l’objet selon qu’il soit en bois ou en terre, avec ou sans bec, avec une ou deux anses, etc.. Il aurait fallu que la question porte sur les dénominations du pot d’eau que l’on utilise à table pour que les données soient comparables. Sur le plan diachronique, notre dernière carte laisse penser que certaines des aires aujourd’hui séparées ne l’ont pas toujours été. L’aire de cruche dans le département de la Seine-Maritime a dû être naguère connectée à celle du nord-ouest, comme l’aire de broc d’eau qui a du naguère être continue. Ce billet vous a plu? Alors n’hésitez pas à le partager sur les réseaux sociaux profitez-en aussi pour vous abonner à notre page Facebook si vous ne voulez manquer aucune info en rapport avec le projet; on est aussi sur Instagram et Twitter. N’hésitez pas non plus à participer à l’une de nos enquêtes sur le français régional. Ça ne prend que dix minutes à tout casser, ça se fait depuis chez soi sur son ordinateur, son téléphone ou sa tablette, anonymement, et ça nous aide beaucoup! Les cartes que nous présentons ne peuvent être fiables que si elles se basent sur les réponses de milliers de participants.